Cole Swensen

Cole Swensen. Photo courtesy éditions Corti.

Cole Swensen. Photo courtesy éditions Corti.

Publications

Suzanne Doppelt
Lazy Suzie
Traduction du français à l’anglais par Cole Swensen
Litmus Press (Brooklyn, NY), 2014
ISBN: 978-1-933959-25-2


Le_notre_Swensen

 

Cole Swensen
Le nôtre
Traduit de l’américain par Maïtreyi & Nicolas Pesquès
Editions Corti, 2013
ISBN : 978-2-7143-1105-4

Cole Swensen (1955, Kentfield, Californie, Etats-Unis) enseigne la littérature à l’université de Brown à Providence (état de Rhode Island, Etats-Unis). Elle a traduit en anglais des poètes français contemporains, notamment Pierre Alfieri, Olivier Cadiot, Suzanne Doppelt.
Elle a publié plusieurs recueils et reçu de nombreuses distinctions, l’Iowa Poetry Prize et le PEN USA Translation Award, notamment.

Troisième livre de poésie de Cole Swensen à paraître chez Corti, Le nôtre conclut ce que l’on pourrait appeler sa trilogie française, après Si riche heure, 2007, qui traverse notre XVème siècle en s’appuyant sur l’iconographie des Très Riches Heures du Duc de Berry, et après L’Âge de verre, 2010, qui considère l’histoire du verre et de la fenêtre à la lumière de l’oeuvre de Bonnard et de quelques autres.

Le livre évoque la personne, l’œuvre et l’époque d’André Le Nôtre (1613-1700), l’inventeur du jardin à la française. C’est une déambulation attentive parmi les espaces créés de toutes pièces par notre célèbre jardinier dont les services furent très recherchés à la Cour des Grands du 17ème siècle. Et si, curieusement, tous ces espaces furent composés pour le plus grand plaisir d’une classe dominante, ils sont de nos jours presque tous devenus des jardins publics, d’où l’ironie du nom de notre héros et du titre de ce livre.

Revisitant ses principaux jardins (Vaux le Vicomte, Chantilly, Saint-Cloud, Versailles, le Luxembourg etc.) Cole Swensen en profite pour faire coulisser l’histoire et la géométrie, tailler ses vers au cordeau, ouvrir et biaiser les perspectives. Elle y affûte le charme et l’aigu de sa prosodie. Résolument contemporaine, son écriture chevauche rigueur constructive et éclats morcelés, sa tranchante élégance restant en phase avec le Grand Siècle qu’elle traverse. Cole Swensen ne manque pas d’interroger à sa façon les raisons et conséquences de ce qui fut à l’origine de l’invention du paysage, qui reste, aujourd’hui encore, profondément attachée à nos manières de regarder le monde. La fabrication de la perspective, le choix des masses et des couleurs : le monde est ainsi modelé et chacun peut alors se l’approprier comme une création domestique.

 

Paradis

Certaines traditions prétendent qu’on ne peut séparer l’homme et le jardin,
ou que si et quand ils le seront, les deux disparaîtront, à l’inverse

de ses jumeaux qu’on ne voit jamais au même endroit en même temps. Nous disparaissons
par une porte, non identifiés

tôt dans le parc, assis derrière le journal du matin
et disons régulièrement je n’y crois pas

au Moyen-Âge on dessinait les nouvelles sur les murs des cimetières. Une longue file
de silhouettes qui se balançaient. Cela aussi, disaient-ils,

est un paradis parce que le ciel descend sur terre chaque fois qu’une main le troue, manoirs
en espalier et millions d’invités.

On appelait oubliette les premiers jardins publics de l’histoire. Sitôt entré,
on ne vous distinguait plus des animaux.

Cole Swensen, Le nôtre